« Duel de stars dans le Far West du numérique »


Changpeng Zhao, cofondateur et PDG de Binance, à Lisbonne, le 1er novembre 2022.

Pour évoluer dans le cyberespace, il faut, comme l’Alice de Lewis Carroll, passer de l’autre côté du miroir. Et se méfier de ce monde inversé, peuplé d’échiquiers et où il faut courir très vite pour rester sur place. Changpeng Zhao et Sam Bankman-Fried y évoluent depuis des années, ils restent pourtant très visibles. Ce sont les stars incontestées des cryptomonnaies, le premier, surnommé CZ, avec sa plate-forme d’échange Binance, de loin la plus importante au monde, et le deuxième, alias SBF, à la tête de son grand concurrent FTX.

Tous deux défrayent la chronique et s’invectivent copieusement par Twitter interposé. Ce mardi 8 novembre, ils ont annoncé le rachat de Ftx.com, la filiale hors Etats-Unis de FTX, par Binance. CZ a fait mordre la poussière à SBF. Selon Bloomberg, la fortune de ce dernier serait passée, en une seule journée, de 15,6 milliards de dollars (15,5 milliards d’euros), valeur de sa participation dans FTX, à… 1 milliard.

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Moins 94 % en vingt-quatre heures, l’une des plus rapides déconfitures de l’histoire des multimilliardaires. A l’image du monde des cryptomonnaies, de ses faillites en chaîne, et de son porte-drapeau, le bitcoin, porté au pinacle depuis deux ans et qui n’en finit pas de dégringoler depuis début 2022. De l’autre côté du miroir, le cyberespace n’a pas de frontières et bien peu de règles.

Première manche

D’origine chinoise, Changpeng Zhao a émigré au Canada à l’âge de 12 ans. Il est reparti à Shanghaï fonder sa société, avant que le pays n’interdise les cryptomonnaies sur son territoire. Il est désormais installé à Dubaï. Sam Bankman-Fried a, lui, créé un fonds d’investissement à Hongkong, Alameda Research, puis la plate-forme FTX. Quittant lui aussi la Chine, il a posé ses bagages aux Bahamas.

Le lieu lui importe peu. Il vit en tee-shirt et bermuda, et dort dans un sac de couchage sous son bureau. Tout juste enfile-t-il un sweat à capuche pour aller témoigner devant le Congrès américain. Lone riders du Far West numérique, CZ et SBF partagent le même rêve d’un monde sans limites et totalement décentralisé, comme avec la finance, qu’ils veulent détacher du carcan insupportable des banques et des Etats. Il existe tout de même une différence entre eux. L’Américain veille à sa notoriété.

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Le stade de basket de Miami porte le nom de son entreprise, et ce personnage aux allures lunaires, avec son épaisse tignasse frisée, promet de léguer sa fortune à des causes environnementales… tout en sponsorisant une écurie de formule 1. Surtout, il veut faire la paix avec les autorités, et réclame désormais une vraie réglementation des cryptomonnaies. Tout l’inverse du Sino-Canadien, qui a définitivement rompu les amarres. Il est l’objet d’enquêtes et de poursuites de toutes parts. C’est pourtant lui, le méchant de la bande, qui a gagné la première manche du duel. Mais il se condamne aussi à rester coincé de l’autre côté du miroir.



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Catégorie article Politique

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